Du passage de stéréotypes par les contes

 Il était une fois, dans un pays fort lointain. Ha ! Mais quelle blague ! Il était une fois ? mais ces contes sont actuels ! Dans un pays fort lointain ? Mais les contes se passent sur le pas de nos portes… 

« Les contes de fées ne sont pas destinés aux enfants, mais aux adultes qui ont besoin de se rappeler que le monde est rempli de merveilles et de mystères. » Cette citation de Chesterton reflète l’importance des contes de fées dans notre culture et notre société. Ces récits populaires, qui ont traversé les siècles et les continents, sont des sources inépuisables d’inspiration, de réflexion et de contemplation.

Dans chacun des trois contes dont nous allons parler, les contextes sociaux sont différents, mais la conséquence des thèmes abordés me semble commune.

D’un point de vue général, les contes de fées ne se limitent pas à une simple distraction ou à une forme de divertissement. Ils sont également porteurs d’une dimension morale et éducative, destinée à inculquer des valeurs telles que la prudence, la patience, la persévérance ou la vertu. En cela, les contes de fées reflètent les préoccupations de leur temps, marqué par des périodes d’instabilité politique et sociale, et cherchent à apporter des réponses aux questions existentielles que se posent les individus.

Les contes de fées ont été un vecteur important de diffusion de la culture et de l’imaginaire populaire, permettant aux personnes de tous horizons de se familiariser avec les traditions et les croyances de leur époque. Ils sont un outil formidable pour la manipulation des valeurs d’une société à la fois car ils touchent d’abord, en apparence, les enfants, mais également parce que ce sont les parents qui les lisent. On se retrouve ainsi avec un double niveau de lecture de chaque conte, et une transmission directe ou subliminale d’information et de valeurs.

Parmi ces contes de fées, « Blanche Neige et les 7 nains » est sans doute l’un des plus connus et des plus aimés. D’abord publié par les frères Grimm en 1812, ce conte a été adapté de nombreuses fois au fil des ans par les FF Grimm eux-mêmes dans un premier temps pour s’adapter à leur public et aux injonctions de leur gouvernement, dans un cadre de tension franco-allemand prélude  à la guerre de 1870, puis notamment par Walt Disney en 1937. Dans chaque version, Blanche Neige et les personnages qui l’entourent symbolisent des idées, des valeurs et des émotions qui sont profondément ancrées dans notre inconscient collectif. On rappellera au passage que ce texte a initialement été écrit par la belle soeur de l’un des FF Grimm, mais la propriété intellectuelle d’une femme n’était pas trop de leurs préoccupations. 

 Mami Wata est une figure emblématique de la culture africaine, issue de différentes régions telles que l’Afrique de l’Ouest, l’Afrique centrale et l’Afrique australe. Mami Wata est une divinité aquatique, représentant la beauté, la féminité, la fertilité et la richesse. Elle est souvent décrite comme une sirène ou une déesse à la queue de poisson, possédant une grande puissance et un pouvoir de séduction sur les hommes. Le mythe de Mami Wata a été transmis de génération en génération et est encore aujourd’hui très présent dans beaucoup de cultures africaines.

Au Congo et au Gabon, Mami Wata représentait par tradition une divinité tutélaire protectrice de la famille. L’évolution de la société congolaise a transformé cette image respectable, faisant de la sirène une sorte de prostituée ou de femme aux mœurs libres pratiquant une forme inavouée de polyandrie. Dans notre époque marquée par l’expansion du sida, elle représente une femme dangereuse pour les hommes, une redoutable séductrice apportant la maladie et la mort. D’autres versions sont moins négatives, Mami Wata serait une femme moderne qui travaille et prend son destin en main ; c’est l’image de la femme libérée, admirée et crainte à la fois.

Certains ethnologues estiment que le mythe de Mami Wata, au corps blanc de sirène, pourrait être associé aux figures de proue en forme de sirène des bateaux esclavagistes, ceci permettant de changer la perception de ces bateaux et des actions associées à ceux-ci.

De son côté, « Princesse Kaguya » est un conte traditionnel japonais datant du Xe siècle. Il raconte l’histoire d’une petite fille trouvée dans une tige de bambou et élevée par un couple de paysans. Elle grandit en une belle jeune femme, courtisée par cinq prétendants, mais elle refuse tous les mariages proposés, disant qu’elle doit retourner dans son monde d’origine. Elle révèle finalement qu’elle est une princesse de la lune envoyée sur Terre en punition pour une faute commise par ses parents. Le conte de la « Princesse Kaguya » est très apprécié au Japon et est souvent adapté dans différentes formes d’art, notamment en manga, en film d’animation ou en pièce de théâtre.

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